La castration d’un poulain…une formalité !!!

 

Juin 2008, Elevage des fjords de Capsil, chez Marion Rivière, dans les Pyrénées :

 

Je suis assise dans l’herbe d’un pré où broute paisiblement un troupeau de fjords : un étalon entouré de ses cinq poulinières et quatre adorables poulains qui ont entre 2 et 1 mois. Je souhaite acquérir deux poulains pour ma fille et moi : nous avons le choix entre trois poulains et une pouliche.

 

Mon souci porte sur la castration des poulains qui sera à effectuer chez nous car nous devons récupérer les poulains à l’âge de 6 mois après le sevrage et avant la chute des premières neiges. Marion me dit que la castration ne pose pas de problème quand elle est réalisée chez des jeunes poulains…c’est une formalité ! Cette opération m’inquiète, je ne sais pas trop dire pourquoi, mais les propos rassurants de l’éleveuse finissent par me rassurer : en trente ans d’élevage, elle n’a jamais eu connaissance de problème de castration avec ses poulains.

 

Après un week-end passé avec les fjords, nous décidons d’adopter Ullo et Utopie avec qui les contacts sont les plus agréables. Ils sont nés à une semaine d’intervalle et leur complicité joyeuse et joueuse nous a séduites. Les fjords étant précoces, il faut impérativement castrer le poulain au printemps pour ne pas avoir de naissance surprise…

 

 novembre 2008

 

Ullo et Utopie arrivent en Drôme provençale. C’est un vrai bonheur de les avoir avec nous, enfin !!!

 

Février 2009

 

Je prends contact avec Equipassion  pour recevoir de l’aide dans l’éducation d’Utopie et Ullo.

Utopie vit une période un peu compliquée que je n’arrive pas à gérer seule.

Alain vient faire une première séance, la prochaine séance est fixée au mois d’avril.

 

Mars 2009

 

Le printemps est arrivé et avec lui, le moment de la castration de Ullo.

 

Les testicules sont bien descendus, il ne fait pas encore trop chaud, les mouches ne sont pas trop présentes…le rendez-vous est pris. La vétérinaire m’informe des différents risques liés à la castration : éventration (rarissime, elle n’en a jamais vu), hémorragies et infections post-opératoires que l’on prévient par un traitement antibiotique et des soins locaux.

 

Elle réalise la castration sous anesthésie générale, en position couchée, à l’aide d’une « perceuse » sur laquelle est fixée une pince à clamper qui est positionnée un peu avant le testicule sur le cordon. En tournant, le clamp entortille le cordon qui finit par rompre ; cette méthode utilisée aux USA semble réduire les risques d’hémorragie.

 

La castration est terminée après une demi-heure ; tout s’est bien passé. Au bout d’un quart d’heure, le poulain se relève un peu groggy, il reste très calme. La vétérinaire prend congé après les recommandations post-opératoires d’usage.

 

Je reste auprès du poulain qui est calme, cherche les caresses. Soudain, ma fille et moi apercevons des boucles intestinales qui commencent à sortir par la plaie gauche de castration…c’est une éviscération. La clinique vétérinaire est appelée mais elle n’arrive pas à joindre la vétérinaire partie pour une autre intervention. Le poulain présente des signes de souffrance, la quantité d’intestin grêle à l’extérieur augmente.

 

Sur les conseils de la clinique vétérinaire, je soutiens les intestins avec un linge propre…il faut éviter absolument que le poulain piétine ses intestins ou que ceux-ci touchent le sol. Le poulain cherche à se coucher, je soutiens autant que mes forces le permettent mais ses 300 kg ont raison plusieurs fois de mes efforts. Le poulain se relève à chaque fois et je reprends les intestins pour les protéger.

 

Ma fille, bien que paniquée, gère le téléphone…la vétérinaire est enfin contactée et revient d’urgence. Le poulain est anesthésié, les intestins lavés et replacés dans la cavité abdominale, les bourses sont suturées. Les effets de l’anesthésie se dissipent et le poulain se relève. Presque aussitôt, les intestins redescendent dans les bourses.

 

L’évidence s’impose, il faut l’opérer afin de remettre les intestins en place, fermer le canal inguinal pour éviter que les intestins n’empruntent cette voie…sinon le poulain va mourir…

La Clinéquine de l’école vétérinaire de Lyon est contactée, ils nous attendent…il faut faire le plus vite possible…chaque heure qui passe dégrade la portion d’intestin qui est sortie à l’air libre et qui stagne comprimée dans les bourses…le processus de nécrose des tissus se propage alors très rapidement…

 

Mais nous n’avons pas encore de van, pas de moyens de transport. En catastrophe, je contacte Alain. Il me donne quatre noms et numéros de téléphone de personnes qui habitent près de chez nous et qui ont un moyen de transport. J’appelle le premier nom, Marie…je lui explique…elle me dit qu’elle fait le plein de son camion et qu’elle arrive…

 

La vétérinaire prépare Ullo pour le transport : elle pose une perfusion, injecte une dose de morphine…le camion arrive…j’ai deux doses de morphine dans mes mains pour apaiser la douleur pendant le transport…

 

Le trajet jusqu’à Lyon nous parait une éternité, je passe presque tout le trajet avec le poulain pour le rassurer et soulager sa douleur avec la morphine. La clinéquine est difficile à trouver, mais nous arrivons enfin…Un comité d’accueil prend aussitôt en charge le poulain. Pour se prononcer sur le pronostic vital, il faut ouvrir…je donne les autorisations nécessaires, il est 18h.

 

A 20h, le chirurgien vient faire son rapport : Ullo est opérable car la portion d’intestin grêle abimée n’est pas trop importante, ni placée à un endroit stratégique, elle peut être retirée, mais, le péritoine a été très abimé quand les intestins ont été remis en place…Ullo a une chance sur deux de survivre après réparation du péritoine.

 

S’il survit aux premières 24 heures et que le péritoine tient, il a alors 2 chances sur trois de s’en sortir, le risque majeur étant l’infection du péritoine…Je donne mon accord à l’opération qui doit durer environ trois heures et je reprends la route du retour avec Marie…Epuisées toutes les deux, nous sommes de retour vers minuit.

 

Il est 00h30 quand le chirurgien m’appelle : l’opération s’est bien passée, Ullo est réveillé et placé en soins intensifs où il restera quelques jours. Commence alors l’attente, le téléphone à portée de main, nous vivons à la maison au rythme des bulletins d’évolution que nous donne l’interne en charge de Ullo. Chaque 24h qui passent nous rassurent ; il y a eu quelques alertes, mais le poulain a envie de vivre.

 

Il commence à être réalimenté au foin mouillé, le transit intestinal se remet en place, au bout d’une semaine, le pronostic de survie est favorable.

 

Avril 2009

 

 Ma fille et moi allons lui rendre visite…elle a été très choquée et a besoin de le voir pour être rassurée. Cette visite a été un vrai bonheur…Ullo nous reconnaît, cherche les caresses…

 

 

Encore une semaine et si tout continue à aller bien, nous pourrons le ramener chez nous. Son alimentation passe du foin mouillé au foin sec à volonté et il est mis en paddock pour sa convalescence.

 

Pendant ce temps, Utopie complètement déstabilisée par l’absence de son frère, se rapproche de nous ; elle progresse à grands pas…la crise passe.

 

Il est temps pour Ullo de revenir à la maison, chez lui, où l’attend Utopie. Pendant un mois, il sera restreint à un tout petit enclos pour ne pas solliciter ses plaies en faisant le fou avec Utopie.

 

Le lendemain  matin de son retour, Ullo montre des signes de colique ; impossible de joindre un vétérinaire équin qui accepte de se déplacer…nous sommes le lundi de Pâques. Un vétérinaire « chien-chat » accepte de me vendre un flacon de calmagine avec seringues et aiguilles mais refuse de venir faire l’injection…les chevaux, ce n’est pas son truc.  Je fais donc ma première injection en suivant les conseils par téléphone de l’interne de garde de la clinéquine avec qui je suis en contact régulier pour suivre l’évolution de Ullo.

 

Marie vient en début d’après-midi et nous réhydratons Ullo à la seringue avec du kanne brottrunk. Le stress du retour et la déshydratation (Ullo ne sait plus boire à son abreuvoir automatique) sont probablement à l’origine de cette colique…Le poulain va mieux, les bruits intestinaux se normalisent et vers 18h, un crottin nous indique que le transit a repris.

 

Pendant une semaine, Ullo est sous surveillance permanente et son alimentation passe à nouveau par le foin mouillé qui est progressivement remplacé par du foin sec. Cette alerte aura été la dernière.

 

Juin 2009

 

Aujourd’hui Ullo va bien. Il a repris du poids et joue comme un fou avec sa sœur Utopie.

 

De cette aventure difficile qui finit si bien, j’ai beaucoup appris et établi des liens très forts avec les deux poneys qui ont cherché vers moi le réconfort à la souffrance pour Ullo et à la séparation pour Utopie.

 

Je retiendrai également la compétence et la disponibilité de l’équipe soignante de la Clinéquine de Lyon, la réactivité et le soutien d’Alain que je n’avais rencontré qu’une fois, et surtout, surtout, l’aide désintéressée et si précieuse de Marie qui est devenue mon amie…

 

Marie

17/06/2009

http://ullo-utopie.vip-blog.com